dimanche 29 janvier 2017

Miss C.

J'aurais pu vous parler des spécialités de Noël en Suisse, ici c'est marrant on mange des fondues pour Noël, j'aurais pu vous parler de la neige qui a a envahi Neuch', les montagnes et notre terrasse. J'aurais pu vous évoquer avec tendresse les énormes stalagmites, ou stalactites je sais plus, que les Braillards récupèrent sur les rochers glacés du lac et qu'ils laissent dans le jardin... Il fait -7° depuis un moment et lesdits stalagmites, ou stalactites je sais plus, squattent à n'en plus finir devant la baie vitrée.

J'aurais pu vous narrer avec enthousiasme les super descentes de luge (en Suisse, une luge s'appelle un bob et c'est même un verbe : "Je vais bober ce week-end") que nous faisons à 20 bornes de la maison. Mon bonheur, presque une fierté de voir mes Braillards habillés de la tête aux pieds en petits norvégiens, les doigts dans le nez, même pas besoin d'acheter des fringues supplémentaires ici, on vient de Norvège, Madame, Monsieur, on en a vu d'autres, on est prêts ! Braillard1 à fond sur sa luge Stiga, recroquevillé comme un crapaud pour aller plus vite..

Les incroyables paysages suisses de montagnes, si vous faites 15 mn de bagnole depuis Neuch', vous passez au dessus du brouillard et il fait beau, le soleil est aveuglant, il étincelle sur la neige, c'est la montée vers le paradis blanc.


Qu'est ce que je vous avais dit ?

J'aurais pu vous faire voyager encore un peu plus, mais le sujet d'aujourd'hui est la coqueluche, que nous appellerons Miss C. pour rigoler un peu. 
Miss C. la sournoise, celle qui nous pourrit la vie depuis des semaines.
Miss C. en Suisse ne colle pas avec l'état d'esprit du pays, elle n'est ni lente ni tranquille... "J'ai 8 secondes pour vous dire que la coqueluche suisse, c'est d'la dynamite !!!" Mais vous allez me dire, keskellrakonte ? Existe plus, la coqueluche, les vaccins, machin chose, DTPolio, rappels, pas possible de l'attraper aujourd'hui ! Ben si, existe encore, et c'est sur nous quatre que c'est tombé. Vous vous rendez compte, choper la coqueluche à mon âge ? Et pourquoi la diphtérie ou la peste bubonique ?? 

Miss C. l'indestructible nous fait tousser à n'en plus finir, une symphonie en quinte majeure (ah ah, pas mal hein ?) pour 4 solistes, même pas foutus de s'accorder, quand l'un va mieux, l'autre s'étouffe, crache et tente de reprendre son souffle difficilement. Mon Husband en toussant devient aussi rouge que la poinsettia, la plante de Noël posée sur la table à manger. La nuit, Braillard1 s’assoit dans son lit, encore endormi, pour tousser plus à son aise et respirer plus facilement. Seul le petit Braillard2 échappe quelque peu à la sadique Miss C., protégé plus ou moins par son vaccin anti-saleté de coqueluche. 

Miss C. l’incontrôlable dure de 1.5 à 3 mois, quelquefois plus, c'est elle la boss. A cause cette sournoise, nous sommes condamnés à vivre au ralenti, obligés de nous ménager de longs moments de récupération. Le temps s'est un peu arrêté chez nous, l'autre jour j'ai mis 10 mn à gravir la côte pour rentrer de l'école, en m'arrêtant pour reprendre mon souffle comme une mamie. J'ai eu une pensée pour mon club de gym, les pauvres, ils vont s'inquiéter et m’envoyer un courrier pour savoir si, à tout hasard, je ne serais pas décédée. Non, pas décédée, mais affaiblie par la perverse Miss C., sa race. 

Cette saleté a fait venir sa vieille copine, la grippe, histoire que la fête soit plus folle chez nous. Elles s'éclatent toutes les 2, et nous font passer de chouettes moments. Il va bien falloir qu'on vire les 2 squatteuses, qu'elles aillent se faire voir ailleurs si j'y suis, y'a plus rien à faire chez nous, circulez !

Tout de bon pour cette nouvelle année, malgré tout !


jeudi 1 décembre 2016

Vis ma vie de maman en Suisse

Il existe un pays où les enfants commencent l'école à 4 ans (et encore, 4 ans REVOLUS), où lesdits enfants de 1ère année n'ont pas école l'après-midi et une journée entière dans la semaine. Un pays où les enfants un peu plus grands terminent l'école à 15h20, ce qui n'est pas bezef... et encore, quand ils ont école l’après-midi. Dans ce pays, le parascolaire, c'est-à-dire, cantoches et garderies, sont conditionnées à un contrat de travail en bonne et due forme.

Vous aurez deviné, et le titre de ce blog vous a un peu aidés, hein ??, ce pays, c'est la Suisse (romande).
Ajoutez à cela un Husband qui travaille beaucoup et fait beaucoup plus d'heures qu'en Norvège, qui est donc moins présent à la maison (MAIS QUI PARTICIPE BEAUCOUP QUAND MÊME, j'veux pas d’ennuis). 

Vous aurez deviné que tout ça n'est pas sans conséquences sur ma petite personne en général, et sur ma santé mentale en particulier.

Mais comment en est-on arrivé là ? Oui, comment ?
En Suisse, les rythmes scolaires sont calqués sur les rythmes scolaires allemands, petite journée pour tout le monde. Et encore, l'âge de l'entrée à l'école était fixé à 5 ans il y a encore quelques années, avec des horaires différents pour les petits et les plus grands. Genre, 8h15  pour les uns et 9h pour les autres, histoire de corser l'affaire !!
Idéologiquement, la place des mamans est à la maison, et même si elles travaillent presque toutes aujourd'hui, c'est toujours à temps partiel, 50%, ou 60%, rarement plus. Pas de congé parental, 14 semaines de congé mat' (instauré en 2005 !), pas de congé paternité en dehors des 2-3 jours réglementaires, d'ailleurs le sujet a été enterré par le Conseil des Etats car jugé non prioritaire. Voyez la place qu'on accord aux Braillards dans ce pays. Conséquence, les femmes ne font pas de gosses, 1 ou 2 grand max. Mouais, quel choc par rapport à la Norvège et même par rapport à la France, où la jeunesse représente l'avenir. ! Je le vois tous les jours, le regard porté sur les Braillards en général est peu bienveillant, je me mange régulièrement des remarques pas sympas sur les miens, dans la rue ou les transports. D'ailleurs je suis en train de rentrer dans une logique de révolte sourde, et de me porter en faux contre cette hostilité à peine cachée de la part de gens d'un certain âge vis à vis de mes fistons. En clair, pète ta gueule les vieux.

Je ferme cette parenthèse sociologique qui vous aura, j'en suis sûre, instruits et passionnés, pour revenir à encore plus intéressant... nous. 

Vous l'aurez compris, je passe beaucoup de temps avec mes Braillards, beaucoup plus qu'en Norvège. On a ainsi développé tous les 3, Braillard1, Braillard2 et moi-même, une petite vie à nous. Une vie faite à la fois de routine et de choses extraordinaires, de trajets immuables entre l'école et la maison (souvent 2 allers-retours par jour), centrés sur notre bus, j'ai nommé le 102, un genre de Graal qui nous est personnel, si on le rate heureusement on a les bus 107 ou 109 qui nous ramènent non loin de la maison. 

Une vie faite de petits soucis, une tonne de petits soucis, un petit élément perdu de Docteur Maboule, alors qu'on avait emprunté le jeu à la ludothèque, on a retrouvé le petit os en plastique un peu plus tard et c'est toute notre journée qui a été illuminée. Le sac à dos de Braillard1, interverti par erreur avec celui d'un autre enfant au cours de judo, et c'est l’événement de la semaine : retrouvera-t-on les affaires de judo mardi prochain ? Le 102 (c'est notre bus, suivez un peu) qui nous passe sous le nez, aaahhh, à 20 secondes près, on l'avait, Braillard1 râle. 
Il y a quelques semaines, Braillard1, encore lui, a retrouvé dans le lac de Neuch' un sac à main abandonné, avec tous les papiers/cartes bleues éparpillés dans l'eau, toute la vie d'une nana était dans ce sac, vous imaginez l’événement dans notre petite vie, nous avons ramené presque fièrement le sac trempé au commissariat du coin. Les Braillards m'en parlent encore..

Oui, je sais, pendant ce temps, des gens sauvent le monde, et prennent des décision majeures pour la bonne marche de la planète, mais que voulez-vous, il faut bien que Docteur Maboule soit rendu complet à la ludothèque de Neuchâtel. 

Qui dira la fatigue morale que je ressens certains jours, le trop plein par rapport aux Braillards, les accès d'insolence du grand, les demandes d'attention incessantes du petit, il faut être ferme avec eux, dans la douceur, les écouter sans se laisser faire, les surveiller sans les étouffer, mission impossible pour moi alors que je passe autant de temps avec eux. Mais je ne suis pas la seule à friser le burn-out, je le vois bien dans le regard fatigué et un peu résigné des mamans que je croise, surtout le mercredi. 

Qui dira l'incroyable chance de voir grandir mes Braillards ? Je vais souvent avec Braillard2, 4 ans et demi, boire un café quand Braillard1 est à l'école l'après-midi, je l'initie à l'art du bistrot, je vois bien qu'il est content de partager ce moment avec moi, dans quelle vie aurai-je pu avoir la chance de vivre ces instants ? La chance de pouvoir lui lire des histoires ou faire des jeux au calme l'après-midi. Nos repas au MacDo ou la crêperie, toujours la même table pour trois. 
La chance d'être saisis tous les 3 par la beauté des Alpes enneigées surplombant le lac de Neuch' , de passer du temps au Jardin Anglais sous le soleil d'automne, la liberté de se dire "allez on rentre à la maison, il est tard" alors qu'il est 16h30, une liberté qui prend tout son sens quand je pense à la vie qu'on aurait à Paris si on n'était jamais partis. Et puis j'ai la chance d'avoir droit à une cantine pour mes Braillards, le mercredi, justifiée par mes heures de formation du DAEFLE (rappelez-vous). J'ai donc une longue matinée à moi par semaine, des heures un peu fébriles dont j'essaie de profiter au max. 

Finalement, une vie faite de joies et de peines, de hauts et de bas, une vie de maman en Suisse, d'ailleurs je vous laisse, il faut que j'aille vérifier si on n'a pas de livres en retard à rendre demain à la bibliothèque de Neuch'.

Allez, tout de bon !